Discours - Jean-Baptiste et Angeline Marty
Jean-Pierre, ou comme nous t’avons toujours appelé : Papé. Notre Papé. Tu es né le 29 août 43 à La Coquille, où t’as grandi auprès de tes parents, Maurice et Marcelle, ainsi que ta petite sœur, Josette, que tu as souhaité protéger toute sa vie.
Tu as passé ton enfance à La Coquille où, entre l’école, la maison et les copains, tu étais un élève studieux et un super joueur de foot.
Pour le lycée, tu es parti à Turgot, à Limoges, un établissement que tu as beaucoup aimé, et où, des années plus tard, nous sommes allés.
Petit, tu rêvais de devenir pilote d’hélicoptère, mais un tympan percé t’en a empêché. Curieux, brillant, tu choisis finalement l’électricité. Tu entres après avoir été diplômé à la MEM à La Coquille où tu as gravi les échelons, jusqu’à en devenir le directeur pendant plus de 40 ans, la moitié de ta vie. Au-delà de ta carrière, tu t’es aussi engagé pour ta commune, adjoint, puis maire de celle-ci, pendant plusieurs années.
En 67, c’est à “Prends-y-garde” – lieu prédestiné, comme une mise en garde du destin que tu allais rencontrer celle qui deviendra en 69 ton épouse : Marie-Paule Faure, notre Mamé. De votre union est née, Anabelle, le 26 juillet 1971.
Tu es devenu père avec autant de joie que de sérieux. Tu as toujours suivi les résultats scolaires de ta fille, et de près. Et en maths, tu es resté son meilleur professeur.
Toute ta vie, tu as toujours su concilier ton travail – très prenant la semaine – avec la vie de famille le week-end notamment en allant aider, l’été, ton beau-père au champ, avec Mamé. Dès que tu avais un moment pour toi, tu retournais à tes passions : la pêche, et surtout la chasse – que tu pratiquais autant pour te balader dans la nature avec des amis que pour le plaisir de promener tes chiens : Volga, Sissi, Anaïs, India, Samba, Austine et Nouchka... tous ont partagé avec toi des heures de marche, de complicité, et de silence au cœur des bois.
Ton sérieux cachait aussi un sacré sens de l’humour. Tu adorais faire des coquineries comme tu les appelais. Un jour, tu as notamment voulu montrer à maman qu’on pouvait faire pousser des cacahuètes séchées à la maison. Tu avais planté avec elle une cacahuète et l’avait missionné de l’arroser chaque jour. Et pendant des semaines, elle a scruté le pot, jusqu’au matin où une tige et une feuille ont enfin percé la terre. Sauf que ce n’était pas une cacahuète, mais un pied de haricot vert. Je pense que Maman devait être folle de rage en découvrant ta supercherie !
Et puis en y repensant, il y a eu cette fois, à Royan, où Maman s’approchait un peu trop du bord des rochers. Inquiet, tu l’appelles, tu cours pour l’attraper. Mais tout ne s’est pas passée comme prévu. Tu as glissé, basculé en arrière, et tu t’es retrouvé les fesses dans l’eau, le short de bain fendu en deux. Toi qui voulais la gronder, c’est finalement toi qui t’es fait gronder par Mamé. Car la maison c’était toi le chef, mais (on sait tous que) c’était mamé qui commandait.
Fin des années 90, tu as rencontré : Jean-Jacques, ton futur gendre, notre papa. Tu as eu l’honneur de les marier tous les deux même si tu as dû t’y reprendre plusieurs fois entre deux quintes de toux, sûrement à cause du trac de la cérémonie. Dans ce nouveau chapitre, tu es toujours resté proche de maman. Tous les soirs, à 20h précises, vous vous appeliez. Sans faute. C’était votre rituel.
AvecJean-Jacques, un autre lien s’est tissé : celui du partage
. Le partage du travail, mais aussi de certains loisirs, comme la pêche. C’était un rendez-vous de transmission, où tu tentais d’initier mon père, à l’art de la pêche à la balance à Royan. Mais il faut bien le dire : les poissons, eux, n’étaient pas toujours au rendez-vous. Alors, pour ne pas rentrer bredouille, et sauver l’honneur, vous alliez parfois au marché... acheter deux trois poissons pour que mamé et maman ait un repas à cuisiner !
Le 28 août 2000, je suis né – un jour avant ton anniversaire. Un cadeau parfait, arrivé un jour en avance. Angeline, nous a rejoint 3 ans plus tard, un 28 également, mais en mars. À nous deux, on ne t’a jamais vraiment laché. Et c’était très bien comme ça !
Tu adorais passer du temps avec nous. Tu aimais nous faire réfléchir, nous questionner, et stimuler notre curiosité. Pour toi, apprendre ce n’était pas que des explications. C’était faire, essayer, se tromper parfois... mais recommencer, aller jusqu’au bout, pour être fier du travail accompli. Et qu’on puisse se tourner vers toi et te dire : « Regarde Papé, j’y suis arrivé. » On voulait voir cette fierté dans tes yeux qu’on n’oubliera jamais. Car tu ne disais pas “bravo” pour rien. Il fallait le mériter, tu étais exigeant.
A la coquille tu avais instauré des règles de vie : ne pas s’égnorler, ne pas s’insulter, ne pas hurler quand papé et mamé sont au téléphonne. Mais finalement on ne les a pas tellement respectées ces règles.
Avec toi, on a découvert les mathématiques, mais aussi le bricolage, le jardinage, ou encore la mer, avec des après-midis remplis de jeux, et de baignades à Royan. Où quand on se plaignait du froid en se baignant, tu avais toujours une solution bien à toi : « Mettez des chaussettes mes petits, vous n’aurez plus froid ! ».
Avec Mamé, vous nous avais fait sillonner la Dordogne, en long, en large, et en souvenirs. Toi au volant, Mamé en copilote, France Bleu Périgord en fond sonore. Grottes, châteaux, rivières... et tellement d’autres merveilles qu’on ne pourrait toutes les citer.
Mais il faut le dire ce qu’on préférait, c’était notre rituel : après chaque déjeuner, une balade autour de l’étang de Bussière-Galant. Un moment tranquille, pour digérer, discuter... et peut-être aussi pour nous fatiguer un peu. Histoire d’éviter, comme tu le disais, qu’on fasse la java le soir avec ma soeur.
Mais avec le temps, les saisons ont changé. Les dernières années n’ont pas été des plus tendres pour toi. Mamé est tombée malade : Alzheimer, cette maladie que nous on n’oublie pas, et que tu n’as jamais vraiment acceptée. Mais, tu es resté fidèle à toi-même. Tu as tout fait pour la garder à la maison, le plus longtemps possible. Tu t’es occupé d’elle avec patience, amour et tendresse malgré les difficultés. Et même si, à contrecœur, tu as dû la placer en maison de retraite, tu n’as jamais manqué d’aller la voir pour toujours être à ses côtés.
Quand ton propre corps a commencé à lâcher, ton esprit, lui, est resté animé jusqu’au bout. Et dans un dernier geste d’amour, tu as décidé de retourner voir Mamé en maison de retraire une ultime fois. Peu de temps après nous avoir tous revu une dernière fois, tu es parti dans la nuit de jeudi à vendredi dernier.
Aujourd’hui, nous avons une pensée toute particulière pour notre Mamé qui ne peut pas être là, mais qui demeure à travers nous.
Papé, tu étais pour nous la rigueur en chemise, toujours à l’heure, méthodique, consciencieux, et discipliné. Un homme simple qui filait droit.
Tu nous manques déjà. Mais nous le savons : tu n’es pas très loin. Tu restes là, quelque part, à veiller sur nous. Invisible mais bien présent. Et tout ce que tu nous as transmis, nous espérons un jour pouvoir le transmettre à notre tour.
Merci Papé.